13/01/2011
Géotripotages : Amérique du sud
L'Amérique du sud, elle aussi, a été peuplée tardivement en un flash d'histoire. Pourtant, des bandes rivales ont rapidement créé des pays différents, essentiellement pour des raisons mercantiles, et face à une quasi absence d'opposition locale, contrairement à ce qui se passait au nord. Progresser dans cette région du monde est un défi jusques et y compris avec les moyens matériels du XXe siècle : une troupe aguerrie y progresse de 800 mètres en une heure, les animaux dangereux sont légion, les distances terrestres sont bien plus élevées qu'en Europe. Pourtant cet immense territoire recèle une myriade de richesses - non pas l'or de l'El Dorado, mais quasiment tout le reste : le Chili moderne a commencé sa carrière comme fournisseur quasi exclusif de guano aux armées européennes, il continue aujourd'hui comme un énorme producteur de cuivre, et il sera demain le seul fournisseur d'atmosphère assez propre pour regarder les étoiles. Chaque région est riche : il ne reste plus qu'à tracer des traits !
L'Amazonie, à qui j'ai rendu son vieux nom hispanisant de Mato Grosso, se repère instantanément sur les photos satellite. A son côté se trouve le Nordeste, qui a fait une OPA sur ce qui reste du Brésil. Au centre du pays, les Guaranis subsistent très bien sans ouverture vers la mer. Au sud-ouest, c'est un pays étrange que celui des Andes - mais pas plus étrange que ne l'est l'actuel Chili. Celui-ci est un pays mineur : maintenant qu'il n'y a plus de guano, c'est lui qui alimente la Chine en cuivre et en lithium ; ses réserves en pétrole et en gaz sont à peine explorées, un peu éloignées du centre du pays, qui en cela préfère largement le Vénézuela, vieux pays pétrolier, mais aussi la Colombie, où tout pousse. Tous ces pays sont jeunes, grands, riches de ressources ; il ne leur manque que l'expérience.
Plusieurs pays sont passés à la trappe dans cette affaire : Equateur, Pérou et Bolivie vont m'en vouloir, et je ne parle pas du Suriname ou de la Guyane dite française : ces derniers n'existent que parce que personne ne peut peupler une pareille étendue en trois générations. Quand aux trois premiers, ils sont arrivés sur la carte au dernier moment, et leur justification culturelle ou historique est délicate.
NB : les idées à la base de la création de cette carte sont développées dans la page Géotripotages
00:00 Publié dans Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | | del.icio.us | | Digg | Facebook |
12/01/2011
Géotripotages : Amérique du nord
Attaquons-nous maintenant à un sujet moins polémique : l'Amérique du nord est un continent très récemment peuplé, et dont les Européens se sont employés à éradiquer les populations en arrivant, ce qui simplifie la situation politique.
La géographie, ainsi que la faune et la flore de ce continent, semblent plus simples que sur le Vieux Continent : sur le côté est, à l'emplacement de la préhistorique forêt atlantique, une première zone très cohérente saute aux yeux : le territoire Cherokee, bien homogène du Maine à la Louisiane. A l'ouest, le bouclier des Rocheuses est d'une efficacité redoutable et isole le territoire Navajo, qui aura plus d'affinités avec le Pacifique qu'avec son frère atlantique.
Au centre, c'est Tasiwa, le pays du bison (Tasiwa est le bison en Comanche), qui autrefois arpentait par millions les grandes plaines du centre. Au nord de ces trois frères aux caractères bien différents, on trouve Ojibwé, qui nous rappelle la Sibérie, et l'Alaska (mot d'origine Aléoute), qui comme Diamondia est un défi au développement autonome, alors qu'il recèle nombre de richesses et de promesses. Enfin Nunavut vient coiffer le continent ; lui aussi compte déjà les péages qui'l percevra au Passage du Nord-Ouest.
J'en entends déjà s'écrier : "Triche ! C'est la Corn Belt !" "Non, c'est Tornado Alley !" etc. Les raisons sont plus simples : cette région du monde a été peuplée brutalement par des humains qui avaient peu les capacités de modifier leur environnement. Ils ont donc suivi la ligne de plus grande pente écologique (extermination des bisons mise à part) et ils se sont majoritairement adaptés aux zones écologiques. D'ailleurs, un coup d'oeil à la densité de population démontre qu'on a peuplé les zones les plus faciles, en laissant de côté les zones désertiques. Cela est d'ailleurs en train de changer, et on ne peut qu'envisager une nouvelle accumulation d'erreurs écologiques dans cette région.
NB : les idées à la base de la création de cette carte sont développées dans la page Géotripotages
00:04 Publié dans Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (2) | | del.icio.us | | Digg | Facebook |
11/01/2011
Géotripotages : Europe
Après beaucoup de tergiversations et de détours par l'extrémité de la planète, voici enfin l'exercice le plus difficile : l'Europe. Pourquoi le plus difficile ? Essentiellement parce que nous en connaissons tous, peu ou prou, l'histoire, la géographie, la politique et l'état actuel ; notre vision est donc forcément influencée et partiale. Par sécurité, je m'empresse de signaler qu'aujourd'hui même, les meilleurs spécialistes sont infoutus de dire où s'arrête l'Europe, ni quel genre de régime politique elle devrait avoir. Quand à lui envisager un avenir, alors là...
Face à toute cette incompétence (ou pusillanimité, comme on veut), le poids de l'histoire joue tout son rôle. Car il y a au moins deux acteurs qui avaient une vision de l'Europe, même s'ils en ignoraient le nom.
Le premier acteur fut l'Empire Romain, qui je le reconnais n'avait pas grand intérêt pour l'Europe, mais plutôt pour Mare Nostrum - la Mer Méditerranée la bien nommée, que les Romains n'eurent de cesse de conquérir en totalité, l'aventure carthaginoise les ayant lassés des initiatives locales. Ajoutons qu'ils n'ont fait que suivre un chemin déjà tracé par les Phéniciens avant eux, et il sera facile de se convaincre que le véritable berceau de l'Europe, c'est la Méditerranée (qui elle-même est née du Croissant Fertile, mais c'est une autre histoire). Le monsieur en vignette est vraisemblablement Jules César, tel que découvert récemment dans le Rhône - sacrée gueule non ?
800 ans, et peut-être 80 invasions plus tard, un autre acteur se penche sur la question, non pas depuis le nid douillet de son bureau, mais les armes à la main, c'est Charlemagne, qui propose une autre vision du sujet. L'Europe s'est déplacée vers le nord, et ce mouvement ne fait que traduire l'importance des populations venues de l'est, et qui se sont installées dans un houleux équilibre dans ces régions accueillantes. La naissance de ce nouvel empire se fait aux dépens des puissances du sud, empêtrées dans des guerres interminables, ce qui devrait être une leçon pour tout le monde : le pouvoir revient à celui qui sait imposer la paix autant que la guerre. Hélas, l'Europe l'oubliera trop souvent.
C'est sans doute la particularité première de l'Europe : avec un climat tempéré, une mer intérieure et une ouverture vers l'océan, et pas de calamités telles que typhons ou volcanisme, elle a nombre d'éléments favorables à l'éclosion d'une civilisation. Donc peu importe comment on la découpe, les choses y progresseront indépendamment de la bêtise humaine.
A peine Charlemagne disparu, on s'emploie à découper son héritage en petits bouts, et tout est à refaire : de même que la ruée inouïe d'Alexandre avait rapproché des peuples qui s'ignoraient complètement, et se sont empressés de s'ignorer à nouveau après son passage, de même l'unification de la culture et des objectifs des peuples européens n'a pas eu le temps de se faire : les grands hommes font les empires, mais ce sont les grands peuples qui font les nations.
Un dernier détour par l'année 1900, que j'apprécie beaucoup sur le plan géopolitique. A cette date, l'Europe, considérée collectivement, est une puissance suprême. Colonialement, elle ne cesse d'étendre ses territoires ; militairement elle est écrasante ; culturellement elle est une merveille. Et pourtant, les racines du mal sont toutes là. Elle n'a pas su maintenir les USA dans son giron, et a ignoré l'avenir de ce nouveau géant ; elle a cru que la prochaine guerre serait facile, et aux dépens de ses deux voisins affaiblis, l'Empire Ottoman et l'Empire Russe. 45 ans plus tard, l'Europe n'est plus qu'un petit tas de ruines, incapable de se relever seule, elle laisse tomber au sol le sceptre de la suprématie, que les USA ramassent avant même de l'avoir convoité. L'Europe en 45 ans a détruit ce que nos ancêtres avaient difficilement bâti en 2 000 ans, justifiant la phrase de Schiller (ou de Nietszche ou de Platon, comme on veut) : "Contre la stupidité, les Dieux eux-mêmes luttent en vain". Je suis même tenté d'ajouter que l'Europe a connu son ascension non pas grâce à l'intelligence des Européens, mais en dépit de celle-ci. Au-delà de la boutade, il me semble que l'Europe offre un territoire tellement privilégié, que n'importe qui aurait pu y réussir. Ainsi ce que les Européens ont longtemps pris pour de l'excellence n'est que le résultat de hasards favorables.
Ces deux guerres auront eu un avantage : rappeler aux Européens que seule la paix est une option, et (parmi tant d'autres) une grave conséquence : les terroriser face à leur avenir. C'est ainsi qu'il n' y a toujours pas, aujourd'hui, soit 70 ans plus tard, d'école moderne proposant un destin européen. Alors face à ces multiples bévues, n'hésitons pas à tracer des traits : même maladroits, ils ne le seront guère plus que ce que bien d'autres ont fait jusqu'à présent.
Tout d'abord appuyons-nous fermement sur notre carte satellite : même si les espaces immenses de l'Est nous donnent le vertige, nous devons admettre qu'ils ne sont pas de notre compétence, et les premiers champs de blé ukrainiens, les premiers bouleaux de la taïga russe marquent le bout de notre culture. Même les Grecs n'ont jamais considéré que le Pont Euxin leur appartenait, et il est à bien des égards le début de la Route de la Soie. Enfin la partie occidentale de la Turquie est pour moi européenne : où est Troie si ce n'est dans mon coeur ?
Au sud, le sujet est vite délicat ; le Maghreb est fils d'Atlas, et en cela, est-il méditerranéen, donc européen, ou africain ? Pour moi l'explication est dans le futur, je laisse la discussion ouverte.
Les îles britanniques présentent curieusement une partition agricole qui ressemble tant à leur partition politique que je n'ai pu m'empêcher de la maintenir ; cependant je reconnais que ces îles ont vocation à rejoindre un jour l'Europe, mais je ne suis pas convaincu que ce jour soit arrivé : les îliens ont toujours un problème mental avec les continentaux, nous le reverrons avec le Japon.
Enfin au nord, mal gré que j'en aie, le satellite ne peut mentir, et nous montre bien que les actuelles Norvège, Suède et Finlande sont un autre biotope, une autre façon de vivre. Les puristes remarqueront immédiatement quelques "détails" hautement historiques. La Russie en effet perd Mourmansk et son ouverture vers les mers chaudes, alors que ce point particulier a fait l'objet de furieux combats ; de même la disparition de la Finlande nie tout un pan de l'histoire ; enfin le petit territoire de Malmö qui rejoint l'Europe aux dépens de la Suède nous ramène presque au Moyen-âge. Ces trois mini-exemples montrent bien que le biotope est une chose, la politique en est une autre, et toutes les cartes qui sont présentées dans cette série expriment en réalité le substrat territorial à partir duquel les ambitions de chaque peuple peuvent s'exprimer.
NB : les idées à la base de la création de cette carte sont développées dans la page Géotripotages
00:00 Publié dans Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | | del.icio.us | | Digg | Facebook |