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19/01/2011

Le Ministère de l'Economie du Savoir

Depuis quelques années, il y a une sorte de fureur, de la part des gouvernements, à créer des noms de ministères absolument stupéfiants, du genre "Ministère de l'Écologie, du Développement durable, des Transports et du Logement". Pour bien montrer que je ne vise personne, citons le "Ministère de l'Energie et des Affaires Energétiques", ce qui ne veut pas dire qu'on risque de se faire rattraper par des affaires, mais essentiellement qu'à Trinidad, on est un gros exportateur de gaz naturel, ou encore le défunt MITI (qui s'appelle maintenant METI). Systématiquement, ces noms cherchent plus à transmettre une image, une volonté, qu'à décrire l'action précise des valeureux fonctionnaires, rappelant en cela le célèbre "Ministère de la Vérité" cher à George Orwell. Cette volonté tranche avec l'ancienne présentation qui suggérait des armées de fonctionnaires écrasés de dossiers sans objet apparent. ("Combien de personnes travaillent dans votre Ministère ?" "Oh, environ la moitié")

Korea Offers Excellence in Nuclear Power Technologies.JPGLes Coréens ont inventé en 2008 le "Ministry of Knowledge Economy" (MKE), qui se traduit sans doute par le "Ministère de l'Economie Tertiaire", mais je préfère "Ministère de l'Economie du Savoir", c'est quand même plus beau. Sa mission est bien ce que son nom laisse entendre, faire basculer la Corée d'une économie industrielle florissante vers une économie tertiaire plus florissante encore. Alors que la page de garde arbore une gentille petite fille tenant la main d'un gentil robot qui doit lui servir de nounou, tout le reste est assez clair : on fait figurer le prix du baril de WTI et de jolies photos de centrales nucléaires : on sent vite qu'au-delà de l'image, il y a de l'action.

C'est ce ministère qui vient de traiter avec la Mongolie pour développer le charbon de ce pays. Soyons géopolitique : la Mongolie est loin de tout, habitée par personne, trop grande, et tous ses voisins ("tous"=2) sont bien contents qu'il en soit ainsi, puisqu'elle sert de tampon entre deux puissances potentiellement ennemies. Tous ses voisins ont donc un intérêt objectif à ne pas développer cette région, et alors que Russes comme Chinois dépensent des sommes énormes pour créer des liens fixes transcontinentaux, ces derniers ont une furieuse tendance à contourner la Mongolie. Quand on est pauvre, on reste pauvre.

Entre donc en scène le MKE et sa mission. La Mongolie, sérieusement, regorge de richesses minières, il suffit de comparer avec son équivalent chinois (Mongolie intérieure) bardée de cheminées d'usines pour s'en convaincre. Le MKE a donc proposé un deal assez sympa aux Mongols, la Corée fournit le savoir-faire et les capitaux, la Mongolie fournit le terrain (dont elle ne sait que faire) et le charbon (dont personne ne veut car la plus proche voie ferrée est à 1 500 km). Tout ça pour ? Faire des carburants synthétiques bien sûr, "green-washés" en "charbon propre". On a un peu de mal à réconcilier l'image de Bercy avec ce genre d'opérations de haut niveau.

3032854938_61f85bf47c_b.jpgSignalons au passage que la Mongolie pourrait finalement bénéficier indirectement du peu d'intérêt affiché par ses voisins : le Japon, lassé de voir grimper le prix du minerai chinois, vient d'annoncer un projet commun de développement des Terres Rares mongoles. Comme quoi, quand on est pauvre, il y a toujours de l'espoir - l'espoir de voir arriver les industries polluantes dont les pays riches ne veulent plus. Mais bon, on peut aussi rester vivre sous sa ger (on ne dit pas yourte, qui est un mot russe :-) ).

05:54 Publié dans Charbon, Economie, Energies fossiles | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook |

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