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13/06/2007

Ne sauvons pas la planète !

On entend encore fréquemment ces mots, prononcés soit par des Ecolos Chevelus avec ferveur : "Il faut sauver la planète !", soit au contraire par des réactionnaires quelconques et multiples, prononcés cette fois avec mépris :"Ah oui, vous voulez sauver la planète..." Que signifient-ils ?

Dans les années 1960, alors que la biodiversité terrestre n'était déjà plus qu'un souvenir dans la plupart des pays de l'OCDE, l'afflux massif d'intrants dans l'agriculture finit par poser quelques problèmes ; presque simultanément, l'extinction spectaculaire de certaines espèces de cétacés commença à faire réfléchir sur notre exploitation-pillage de la mer : on commença à se rendre compte que le fonctionnement quasi-miraculeux de la nature trouvait ses limites face à l'ingérence de l'homme.

Mais notre ignorance de notre propre planète en tant qu'organisme évolutif était encore grande, la tectonique des plaques commençait tout juste à être enseignée, et la notion de système complexe n'existait pas encore.

En cinquante ans, des pas de géants ont été accomplis : la notion de biotope est maîtrisée par l'homme de la rue, les paléos parlent couramment des cinq extinctions massives, la télévision propose des programmes montrant le calcul de la température de la planète avec et sans atmosphère. Le doute n'est plus permis, si la planète ne peut être considérée comme un organisme vivant, notion trop facilement anthropocentriste, elle est certainement un système avec ses règles et son évolution.

Et aujourd'hui, cette évolution consiste à élever sa température très rapidement, conduisant ainsi à une nouvelle modification des conditions de fonctionnement, comme elle en a connu des milliers dans son histoire.

Notre planète n'est pas en péril : elle va passer d'un état stable à un autre état stable ; cet autre état stable va générer ses propres espèces, mieux adaptées aux nouvelles conditions de température. Il n'est pas certain que l'homme y ait sa place, et la planète s'en moque complètement : elle a déjà nettoyé l'ardoise cinq fois, pourquoi pas une sixième.

Il est donc hors de question de sauver la planète. D'abord, parce qu'elle n'est pas en péril : elle se débrouille très bien toute seule, merci. Ensuite parce que, avec toute la bonne volonté du monde, nous n'en avons pas les moyens matériels : malgré tous nos laboratoires de recherche, nous sommes encore aujourd'hui incapables de créer la moindre espèce de toutes pièces, encore moins à recréer un biotope, qui de toutes façons, se modèle sur plusieurs millénaires. Protéger la planète ? Mais nous ne savons même pas combien d'espèces disparaissent chaque jour.

Mais surtout, parce que c'est bien nous qui sommes en question : à la fin de ce siècle, nous et nos descendants serons confrontés à une telle quantité de petites misères que nous aurons fort à faire pour nous y adapter. Il n'est écrit nulle part que l'homme a gagné le loto de la Création, avec une certitude de survie : au contraire, notre Mère Nourricière a déjà fait la preuve de son cynisme, en éradiquant cinq fois ses créations : si l'on s'en tient aux simples probabilités, les bookmakers nous regardent plutôt avec pitié.

Les adaptations que nous aurons à réaliser seront multiples et variées : s'adapter à la sécheresse ici, aux pluies torrentielles là ; au réchauffement estival ici, au refroidissemnt là ; à la disparition de nombreuses espèces utiles dans la chaîne de l'agriculture ; à peu près aucune région de la planète n'échappera à ces petites misères qui individuellement seront tout-à-fait gérables, mais mises bout à bout mobiliseront l'essentiel de nos ressources.

Ces difficultés commenceront à survenir au moment même où nous toucherons vraisemblablement un point haut de notre démographie, ainsi qu'une déplétion de nos ressources en général, et de l'énergie facile en particulier.

La concomitance de ces facteurs en fait un délice pour gestionnaire de crises, mais pas pour le décisionnaire, qui voit arriver une multitude de soucis comme autant d'agressions directes.

Le pire pour les idées d'aujourd'hui, c'est bien les idées d'hier. Alors ne sauvons pas la planète, sauvons-nous !

19:05 Publié dans Futur | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : biodiversité avenir scenario futur | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook |

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